La relation que peut avoir une entreprise avec sa banque (où un chef d’entreprise avec son banquier) n’est pareille à aucune autre. Un mélange de ‘je t’aime moi non plus’ , de ‘Donnez moi une hache que je lui refasse le nez’ et ‘Oh secours, non il va me manger, j’ai peur’.
Ce désamour, cette défiance, cette incompréhension profonde (parfois des deux parties) vient de plusieurs raisons :
1 – On est des clients, sans les pouvoirs du client.
On le sait bien, les clients ont du pouvoir. Après tout, comme on le dit suffisamment souvent : ‘Le client est roi’. Et puis au final, c’est lui qui fait le chèque. Donc dans une certaine mesure, tant qu’ils nous demandent pas d’aller cueillir des marguerites sur la Lune, on essaie de les rendre heureux.
Et nous, quand on se retrouve client, on s’attend à ce que nos fournisseurs fassent de même, essaient de nous rendre heureux.
Ce qui rend chaque visite chez le banquier très déstabilisante. Parce que le banquier ne nous chouchoute pas. Parce qu’on a plus l’impression d’être des clients qu’il faut à tout pris contenter mais plutôt des mauvais élèves de primaires, que la maitresse regarde avec de gros yeux, juste avant de les envoyer au coin, avec un bonnet d’âne sur la tête.
Parce qu’au fond, lui, comme moi et comme vous, on sait tous, qu’au final, on a besoin de lui. Qu’au final, il est indispensable et que nos sous, il finira par les avoir. Et que de toute façon on est trop petit, noyé au milieu de tellement d’autres clients, qu’on ne pourra pas faire de bien grande vague.
On prend le banquier pour ce qu’il n’est pas.
On aimerait que le banquier prenne des risques, nous finance. Mais malheureusement, il n’est pas la pour ça. Le banquier, c’est un peu comme le dragon des contes de fées. Il stocke son énorme tas d’or et n’aime pas qu’on vienne lui prendre quelques pièces. Même si on promet de lui rendre. Bon heureusement, je n’ai encore jamais croisé de banquier capable de cracher des flammes. (je n’imagine même pas dans quelle panade serait l’humanité si les banquiers pouvaient cracher des flammes… )
Pour réussir à avoir quelques piécettes, il faut donc le cajoler, encore et encore, faire la danse du business plan, chanter l’opéra du prévisionnel à 5 ans et alors peut-être, si il est de bonne humeur et que la bouillabaisse du midi ne lui ai pas resté sur l’estomac, il dira oui.
Mais rien n’est moins sur. Et bien entendu, cela va dépendre du pourquoi vous voulez ces quelques piécettes :
- Acheter du matériel immobilisable ? Là il dira oui, parce que dans le pire des cas, il pourra récupérer une bonne partie de ses billes en saisissant le matos.
- Démarrer une entreprise ? Si vous n’êtes pas trop gourmand et que vous vous engagez sur 13 générations, en signant avec votre sang, il le ferra aussi. Dans le pire des cas, il pourra récupérer votre voiture ou votre maison.
- Financer une politique d’embauche (payer des salaires quoi) Alors là, même pas en rêve.
C’est là, dans cette petite liste de trois items, que se niche l’une des raisons des relations tendues entre les chef d’entreprise et les banquiers.
On pense qu’ils sont là pour nous aider à financer nos entreprises. Alors que non. Ils sont là pour minimiser les risques qu’ils vont prendre avec l’argent qu’ils ont dans leur salles aux trésors. Et ils minimisent les risques en acceptant de financer les achats que pourraient faire nos entreprises et seulement cela.
Si vous me permettez de revêtir mon habit de Père Castor, j’ai une petite anecdote illustrant la frilosité des banquier en ce qui concerne la création d’entreprise et les prêt à ce moment là. Il faut d’abord savoir qu’une banque n’est pas obligé de vous ouvrir un compte, il faut la convaincre de le faire. Mais revenons en à la petite histoire que je voulais vous raconter. Les héros en sont un groupe de créateur d’entreprise, de mémoire ils étaient 3, tous la trentaine, que nous avons croisé mes associés et moi quand nous étions en incubateur d’entreprise. Les trois compères s’étaient donc lancés dans la tournée des banques pour essayer d’en convaincre une. L’un des directeurs d’agence qui les a reçu a eu le culot de leur demander un topo sur la situation financière de leur parents et les avaient prévenus leurs parents devraient se porter garant du prêt que la banque pourrait consentir à la jeune entreprise. Autant dire que nos trois associés n’ont pas choisi cette banque là. (pour la petite morale, aujourd’hui la petite entreprise est passée de 3 à 12 salariés et se porte plus que bien)
Il sent bien qu’on ne l’aime pas.
Parce qu’on ne va jamais le voir, à part quand on a besoin de lui. Il se sent un peu comme la cinquième roue du carrosse la notre pauvre banquier. Comme le premier de la classe mal-aimé à qui on ne parle jamais, sauf quand on a besoin qu’il nous donne les réponses du dernier exo que l’on a pas fait. Son coeur saigne à notre gentil banquier. Et du coup, quand on vient le voir, à reculons, sans vraiment savoir quoi lui dire, et ben il prend sa revanche. Il nous montre que lui aussi, il ne nous aime pas de toute façon.
Au final
Même si il est vrai les relations entre un banquier et un chef d’entreprise ne sont pas souvent dés plus facile surtout à cause du fait que la balance des pouvoirs étant complétement faussés, il me semble qu’il est tout à fait possible de vivre en bonne intelligence avec sa banque. Il suffit pour cela , j’en suis convaincu, de respecter quelques règles simples (qui découlent la plupart des trois constatations au-dessus) que je listerais dans un prochain post.
5 Responses to “Les banques, pourquoi est ce que ce n’est pas l’amour fou entre elles et nous ?”
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[…] http://j-mad.com/blog/2009/07/26/les-banques-pourquoi-est-ce-que-ce-nest-pas-lamour-fou-entre-elles… […]
Excellentissime !
C’est exactement ça, et on pourrait en rajouter des tartines, on ne ferait que développer. L’essentiel est là : le client qui n’en n’est pas vraiment un, m’obligation mutuelle et déséquilibrée, la danse du ventre (et ses variantes), l’erreur sur la promesse, et la frustration réciproque.
A réciter à tous les créateurs, à tous les clients, à tous les analystes de la crise. Un des noeuds gordiens de la crise est là. Sans blague !
Jean Michel, bravo !
hum … je vais rougir :).
Merci pour cet éloge en tout cas.
Et l’appeler quand tu as fait une grosse vente, tu as déjà essayé ? Quelque chose du genre : “On a encaissé une super vente aujoud’hui, vous devriez voir arriver le chèque d’ici peu. Merci de votre confiance c’est aussi grâce à votre soutien qu’on y est arrivé.”
Ok, j’en fais peut-être un peu trop mais, pour rebondir sur ton chapitre “Il sent bien qu’on ne l’aime pas”, l’idée c’est de l’inclure dans ton équipe. Qu’est-ce que tu en penses, ça pourrait marché ? … ou pas !
clairement oui. Après il faut pas forcément en faire des tonnes et des tonnes. (je parle pour le ‘c’est grâce à vous que ….’, enfin sauf si c’est vraiment grâce à lui). Mais l’informer des nouveautés, des bonnes nouvelles, il faut le faire.