Jan 232010
 

Je l’ai déjà dit, et je le redirais, il peut être, à mon avis, très interagissant d’utiliser les mécanismes des jeux vidéos pour améliorer l’expérience utilisateur des logiciels non jeux vidéos. Je vais essayer dans ce petit billet de mettre en relation les types de joueurs avec des idées de trucs à intégrer dans les applis.

Le classement de types de joueurs que j’utiliserais est le classement du Bartle Test of Gamer Psychology, classement utilisé dans les MMORPG (et que l’on retrouvera aussi dans toute première partie de manuel du maître de n’importe quel jeu de rôle, avec parfois des noms différents).

Il classe les joueurs suivant une pondération de 4 catégories:  achiever, explorer, socializer, killer. La somme des quatres ‘notes’ d’un joueur doit faire 200 et aucune ne peut être supérieure à 100. Vous pouvez donc être le joueur suivant : 55 % killer, 75 % socializer, 20 % achiever et 50 % explorer. Ce doit être, de mémoire, presque mon profil de joueur. Voyons voir un peu plus en détail ce que signifie ces catégories (pour une description précise, je vous renvoie à la très complète page Wikipedia sur le sujet).

1- Les types de joueurs

1.1 Le collectionneur compulsif (aka l’achiever)

Le joueur collectionneur adore par dessus tout… Collectionner. C’est logique. Il aime réussir à avoir tous les succès, même les plus inutiles ou les plus difficile à avoir. Mettez en place un système de badges et il passera ses journées à les traquer et ce jusqu’à avoir la veste qui ressemble à un général de l’armée. Et si vous voulez vraiment lui faire faire nuits blanches sur nuits blanches, prévoyez un système très fourni d’équipement. L’achiever se sentira obligé d’avoir tous les sets possibles d’armes et d’armures, surtout les plus puissants.

1.2 L’Indiana Jones du dimanche (aka l’explorer)

Lui, ce qu’il aime c’est la sensation grisante de la découverte, le frisson de l’exploration, la montée d’adrénaline du mystère. Il passera des nuits blanche à voyager dans l’univers du jeu, parcourant chaque colline, cartographiant chaque grotte, espérant toujours arriver dans une zone de jeu vierge, ou aucun autre joueur n’aura encore mis les pieds.

1.3 Le “putain ferme la, on veut aller nettoyer l’instance, marre des blabla à la taverne”(aka le socializer)

Lui, ce qui l’intéresse, c’est de papoter. De raconter une histoire commune avec d’autres joueurs dans lequel il inclura son personnage. Il aime les titres parce qu’il peut les intégrer dans l’histoire de son personnage. Il adore pouvoir décider de chaque infime détail de son avatar et passera des heures sur le chat de son MMORPG à balancer des emotes et à offrir des tournées dans les tavernes des différentes villes, stations spatiales, bases sous-marines que comporte le jeu.

1.4 Le petit faquin de merde qui vous a lâchement démoli en vous attaquant dans le dos (aka le killer)

Lui, il n’a qu’un but, larder les autres personnages de coups de dagues, épées magiques, balles de snipers, sorts de boule de feu. Ce qui l’intéresse c’est le duel. Le défi de se mesurer à d’autres joueurs et de tenter de les dominer pour pouvoir ensuite crier un ‘haha’ triomphant à son écran que sa malheureuse victime ne verra pas (ce qui a pour effet de le faire passer pour un fou). Suivant les jeux il passera donc de longues heures à s’entrainer pour devenir le meilleur ou de longues heures à chercher le meilleur équipement possible pour être sûr d’écraser ses ‘concurrents’.

2- Et maintenant, je fais quoi avec mon appli là ?

Ok, ok, j’ai compris. Vous voulez savoir à quoi ça sert de savoir de connaître les différents types de joueurs. C’est tout simple, les joueurs qui sont des achievers dans le jeu vidéo, se sont des achievers aussi quand ils utilisent un logiciel quelconque. Donc en intégrant dans ledit logiciel quelconque des concepts qui plaisent aux achievers dans les jeux vidéos, vous leur ferrez plaisir. Et ils utiliseront avec plus de joie votre appli.

2.1 Ce qui plait aux achievers

Là, c’est assez facile. Et ça va presque être de la redite avec mon précédent billet. Les joueurs achievers adorent les système de succès. Un petit système avec des badges suivant les choses qu’il fait et vous l’avez définitivement conquis. Et là soyez malin. Mixez les types de succès. Par exemple, mettez en place un système de succès qui contient :

  • des succès reliés à ce que font vos utilisateurs (le succès du profil rempli, le succès du tuto d’apprentissage fini, le succès de la lecture de l’aide, etc.),
  • des succès liés à l’assiduité (le succès des 1 000 heures passées sur l’appli ou des 10 000 cellules de tableur remplies),
  • des succès inconnus (dans le panneau des succès ils sont notés comme non réussis, mais on ne connait ni leur nom ni les modalités pour les débloquer).

Vous verrez que vos utilisateurs achievers vont adorer.

2.3 Explore ma nouvelle appli

Pour les explorateurs, c’est déjà plus difficile. Après tout, une appli, c’est une appli. Pour les applis lourdes, je n’ai pour l’instant pas d’idées. Pour les applis web par contre, j’ai quelques pistes. En voilà déjà une. Des pages vers du contenu nouveau qui ne se débloquent qu’à certaines heures ou qu’après avoir résolu une énigme ou avoir accomplis certaines actions dans un ordre bien précis. Bien entendu il faut que les utilisateurs soient au courant que ces zones vierges existent et qu’ils aient des pistes pour arriver à y accéder. Mais une mise en pratique d’un tel système, je suis certain que cela tiendra en haleine vos utilisateurs explorateurs.

2.4 Discute avec les autres, soit sociable

Bon alors pour les socializers, rien de plus facile, et puis tout est déjà là. Permettre à vos utilisateurs de discuter entre eux, d’échanger, de commenter. Quelle application web ne le fait pas, aujourd’hui ?  Par contre pour les applications lourdes, c’est déjà beaucoup moins le cas. Et c’est dommage. Intégrer des espaces de discussion (comprendre des forums light) dans les applications lourdes, même si c’est pour les limiter aux questions/réponses que peuvent avoir les utilisateurs, ce serait déjà un grand pas, à mon avis.

2.5 Et ma grosse épée, tu veux que je…

Là aussi, pour les killers, à priori, ce n’est pas super facile de mettre en place des mécanismes leur rappelant leur pratique du jeu vidéo (à moins d’intégrer un fps dans votre appli, qui se lancera grâce un raccourci clavier tarabiscoté). On peut toutefois en se rappelant que pour la plupart des joueurs de ce type, ce n’est pas le plaisir d’ennuyer les autres qui les motivent, mais la saine compétition. Mettre en place des systèmes des highscore peut donc être une façon de motiver les joueurs de ce type là.

3- En conclusion

Je vais me répéter, encore. Je vais insister sur le fait que se mettre à la place de l’utilisateur lorsque vous concevez une appli, c’est primordial.

Parce que vos utilisateurs sont peut-être obligés d’utiliser votre appli (cas d’une appli métier dans le cadre d’une entreprise). Mais ils ne le sont peut-être pas. Et même s’ils le sont, si vous voulez limiter les appels de mécontentement et autre ennuis, il faut leur faire aimer votre appli. Il faut que lorsqu’ils lancent/se connectent, ils soient impatients, joyeux. Cela ne se suffit pas/plus qu’une application soit fonctionnelle. Il faut aussi qu’elle soit plaisante, un minimum tout au moins.

Pour presque finir, je rajouterais, une dernière chose en tout cas dans ce billet, que l’on peut réutiliser du monde du jeu vidéo. C’est l’attrait de la nouveauté, le rajout de contenu. Là aussi, c’est bien plus facile avec une application web. Mais bon, c’est pas non plus impossible avec des applis lourdes. Pensez à ajouter du contenu dans vos applis. Ici le contenu pourrait être de nouvelles features ajoutées petit à petit, de temps en temps. Ou alors de nouveaux badges/succès. Ou de nouveaux accès cachés. Mais il faut penser à faire vivre son appli, à maintenir ses utilisateurs sous le charme.

Mais, et je finirais presque ainsi, ne me faites pas écrire ce que je n’ai pas écrit. C’est à dire que rajouter des mécanismes venus du jeu vidéo, c’est bien. C’est comment dire, la cerise sur le gâteau. Si l’application en dessous est pourrie ou ne sert à rien, vos utilisateurs fuiront ou râleront très fort et continuellement. C’est d’ailleurs la même chose pour les jeux vidéos. Un mauvais jeu vidéo avec le meilleur système d’achievement du monde, personne n’y jouera bien longtemps (ou alors votre ‘habillage’ fera que vous retiendrez vos utilisateurs un peu plus longtemps, mais ça ne durera pas).

Enfin, et là, c’est vraiment la fin de mon billet, la plupart des mécanismes de ‘rétention du joueur’ se basent, il faut bien l’avouer, sur l’égo du joueur. Mais bon, faites attention à ne pas abuser de ces mécanismes. Personne n’aime être pris pour un con.

  2 Responses to “Types de joueurs et conception d’applications”

    • juste excellent. Et puis tellement vrai. J’adore les slides, tout spécialement celui qui parle d’avoir un plan :).

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