Jul 212009
 

On a  tous été, à une époque plus ou moins reculée, jeune et innocent. Quelle belle époque que celle-là et quelle tristesse d’en être sorti. L’époque radieuse et dorée où la vie était simple, pleine de rêves et d’illusion, où le linge sale se téléportait magiquement du panier à linge jusqu’à l’armoire (en se lavant, se repassant et se pliant), où les jours ne servent qu’à séparer les nuits passées sur les claviers (et aussi à aller faire les courses).

Mais malheureusement,  un jour, un jour, il faut bien grandir. Et, c’est le terrible moment,  où l’on se fait dépiauter de toutes ses illusions, les unes après les autres. Le pire, c’est que la plupart du temps c’est assez douloureux (rappelez vous quand vous avez appris que le Père Noël n’existait pas), un peu comme quand le dentiste vous arrache une dent en ayant oublié de vous anesthésier. (Bon la métaphore n’est pas forcément bien choisie, parce qu’avant qu’on vous l’arrache, votre illusion elle ne vous faisait pas hurler de douleur, alors que cette …. de dent oui).

Aujourd’hui (où plutôt ce soir, vu l’heure tardive), c’est moi qui vais jouer au dentiste et vous arrachez trois des pires illusions que peut avoir un créateur d’entreprise. Ouvrez grand la bouche, tirez la langue, ça ne va pas faire mal du tout, c’est promis ou alors juste un tout petit peu, mais pas grand chose.

1 La pire de toute : ‘Je monte une boîte pour coder des trucs cools’

Celle-là, il n’y a rien de pire. Rien de pire parce que quand on prend conscience du fait que cette phrase n’est qu’une illusion, c’est le moral qui en prend direct un grand coup dans les dents.  Et le moral, c’est primordial quand on est entrepreneur. C’est l’arme secrète qui permet de tout surmonter. Mais aussi la faiblesse ultime qui fait qu’on arrive plus à se lever le matin pour aller au bosser.

Vous allez me dire que parfois, dans certains cas, c’est possible. Effectivement, si vous levez des fonds, que vous avez dés le départ les gens qui vont bien pour s’occuper de l’administratif et de toutes la paperasse et un associé qui aime s’investir dans la gestion, alors oui c’est possible. Mais sinon, n’y pensez même pas. Oubliez. Que vous soyez freelance, auto-entrepreneur, associé dans une SARL, dans tout les cas c’est pareils. Il va falloir :

  • s’occuper de la gestion courante (impôt, TVA, URSSAF, etc etc)
  • faire du commercial
  • s’occuper de se faire payer par les clients
  • gérer et piloter le bousin
  • faire les prestas pour les clients
  • etc etc ….

Alors attention, je ne dis pas qu’on ne peut pas faire de truc cools. Au contraire. Surtout après quelques années, quand les sous rentrent d’une manière assez régulière. Juste qu’il faut s’attendre à devoir, pendant quelques années,  oublier ses rêves de développement fun, cools, qui font passer des nuits entières à rêver du produit final. Parce que malheureusement, il faut aussi ramener des sous pour ne pas finir par déposer le bilan. Et que bizarrement, les projets cools qu’on a dans la tête, ça demande beaucoup d’investissement au départ et ce n’est pas souvent les projets dont ont besoin les clients.

Je parle de coder, mais tout le monde (enfin ceux qui lisent quoi) aura bien compris que c’est simplement pour donner un exemple, la même situation se transpose dans tout les métiers, que vous soyez graphiste, boulanger ou géologue.

2 ‘Je vais être patron, dans 4 ans à moi la BMW et la maison de rêve à Saint Tropez’

Vous voulez devenir riche, et en plus rapidement ? Ne créez pas d’entreprise. Jouez au loto, vous aurez bien plus de chance.  Où alors devenez salarié, amassez des sous et ensuite rachetez une boîte ou investissez en temps que business angels dans différents projets en espérant que certains explosent.

Alors oui forcément il y a toujours des contre exemples à la Facebook ou Google. Mais bon, la plupart du temps entrepreneur ça ne fait pas devenir riche à millions et surtout, surtout pas tout de suite. Les patates à l’eau, les pâtes au beurres et le riz au riz (c’est très bon ça le riz au riz, le riz donne un délicieux goût de … riz, au riz), vous allez connaître par coeur. Et avoir des salariés que vous payerez plus que vous aussi.

3 ‘Notre produit est super top moumoute, il se vendra tout seul’

Quand on crée une boite avec une idée produit, on l’a souvent couvé pendant des mois, des années. On a peaufiné les moindres détails dans sa tête, repensé à chaque chose. Fait plein de prototype. Et puis arrive le moment de la création proprement dite. Et là, on part la tête dans le guidon. On aligne les lignes de code (là encore je prend comme exemple un projet informatique, mais vous pouvez l’appliquer à tout) encore et encore. C’est bien joli et très tripant. Les mois passent et puis finalement  on fait une V1et … c’est tout. Rien ne se passe. Le téléphone reste muet. Personne ne se précipite pour acheter le produit top moumoute.

Parce que personne ne sait qu’il existe.

La partie commerciale. C’est la partie que les créateurs d’entreprises ‘techniques’ ont toujours, toujours, tendance à sous-estimer. Parce qu’ils n’aiment pas ça. Parce qu’ils pensent ne pas savoir faire. Parce qu’ils pensent que ce n’est pas utile, les clients viendront d’eux même vu la super qualité de leur produit. Si seulement le monde pouvait être aussi simple.

Il faut donc faire ‘du commercial’, même si l’on n’aime pas (et je vous promet que je sais ce que c’est..). Et ça, avant même que le produit soit fini. Pour être sur qu’il est en adéquation avec les clients, qu’il va leur plaire (et pas seulement nous plaire), et pour avoir des clients, les premiers, qui paieront dés que le produit sera prêt. Et après continuer, encore et toujours, pour faire exister le produit, le faire connaître, le faire utiliser.

  7 Responses to “Les trois pires illusions de la création d’entreprise”

  1. […] aprés le bonjour-post, 1er "vrai" post, du classique : "Les trois pires illusions de la création d’entreprise" http://j-mad.com/blog/?p=10 […]

  2. C’est sans doute l’idée que je m’en serais fait. La possibilité avait déjà germé dans mon esprit, mais rien n’a été fait en ce sens, et j’essaie aujourd’hui de m’ouvrir d’autres voies.

    D’une manière générale, et c’est peut-être l’idée principale qui ressort de ces conseils, il faut garder les pieds sur terre, être pragmatique. Chose pas toujours à faire quand il s’agit d’un projet qui tient à coeur, et qu’on a la tête dans le guidon, comme tu l’évoquais. Merci de faire part ici de tes premières désillusions 😉

  3. Effectivement, monter sa société ce n’est pas toujours un conte de fée. Malheureusement les journaux ne relatent que les histoires de ceux qui réussissent et ceux-ci ne représentent qu’une partie infinitésimale des créateurs d’entreprises.
    Quoi qu’il arrive, créer sa société demande beaucoup beaucoup d’énergie.
    D’ailleurs à l’occasion du centenaire de la naissance de Paul RICARD, une exposition lui est consacrée sur l’ile des Embiez et sa réussite ne tient qu’à son travail sans relâche.
    D’ailleurs à propos des désillusions et notamment de google, nous avions écrit un article sur notre blog : http://blog.plici.net/2008/10/14/une-bien-belle-histoire/
    Pour souligner tes propos sur la partie administrative, nous avons tendances à dire aux jeunes créateurs de société : « Tu veux vivre de ta passion ? Devient salarié ». En effet, à part les artisans, le coté paperasse remplit à minima la moitié du temps. Et plus l’activité va grossir et plus le temps passé par le gérant à la production va diminuer.
    Mais tout n’est pas si noir, en effet, la création d’une entreprise est une chose passionnante et qui apporte beaucoup. Mais ce n’est pas l’article du blog, et je pense que Jean-Michel fera un petit post à ce sujet.

  4. Sujet éternellement recommencé, et toujours aussi vivace ; il y a des tonnes de littérature, parfois bonne, souvent quelconque, sur le sujet, et pourtant l’essentiel n’est pas là, mais dans le fait de se faire soi-même sa propre expérience. Donc de se faire des idées (des illusions ?) et de les confronter à la réalité des autres, des clients, de soi-même, des collaborateurs, des contraintes extérieures, …
    Le créateur croit qu’il va changer quelque chose dans le monde ou dans une partie du monde, et en fait c’est lui qu’il change. C’est à ça d’ailleurs qu’on voit qu’il a réussit ou pas, s’il a changé.
    J’ai été dans 5 ou 6 équipes de créateurs, et j’en ai monté 3 tout seul, sans compter quelques associations à activités professionnelles. Aucun regret, mais quelques cicatrices et … des illusions en moins.

  5. Je suis pas d’accord pour le fait de devenir riche.
    Avoir son entreprise est clairement un bon placement.

    Mais le problème, c’est que c’est un placement… il faut donc attendre.
    Honnêtement, si tu vendais tout pour redevenir salarié, est-ce que tu ne serais pas riche ?

    Et sinon, comme je te connais un peu (pour les lecteurs, on a été en école d’ingé ensemble), je peux ajouter que je me doutais que tu allais avoir un peu de mal à faire autre chose que coder 😉

    Et sinon, “qui permet de tout surmontER”.

  6. Nicolas, oui, je ferrais des posts un peu plus joyeux après, parce que tout n’est pas noir non plus dans la création d’entreprise, bien au contraire.

    Olivier, au jour d’aujourd’hui, je ne sais pas. Si on vendait tout à quelqu’un (bon forcémment on aurait une clause nous obligeant à être salarié quelques années vu que là pour l’instants les codeurs == les associés) effectivement qu’on aurait un petit pactole. Mais on serait pas riche au point d’acheter une maison à Saint Trop.

  7. et si ce n’etais juste pour le plaisir de créer ? parce que la creation est un virus 😉

    au fait, pour ceux qui ne le savent pas encore je me relance dasn la création, d’aillerus je cherche un bon avocat pour creation des status et contrats commerciaux.

    un putain de bon produits qui va se vendre tout seul (enfin surtout que mon associé va vendre) et me payer ma BMW (ah non je l’ai déja)

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